Allongé sous la voûte céleste, l'homme contemple depuis la nuit des âges la course des planètes, astres errants, sur le fond du carrousel stellaire, girant comme la toupie terrestre. Si le dessin des constellations semble figé à l'echelle d'une vie humaine, les étoiles se meuvent pourtant, et ce dessin change perceptiblement d'un millénaire à l'autre. Notre bon vieux soleil, entouré de son ballet de planètes, tourne lui-même autour du centre de la Voie Lactée, suivant le bras de Persée et précédant celui du Sagittaire. Ces bras spiraux sont des ondes de pression du gaz interstellaire, propices à sa condensation, son lent écroulement gravitationnel, son fractionnement turbulent jusqu'à la formation de portées d'étoiles de masses variables. À mesure que l'on s'approche du centre de la voie lactée, la géométrie aplatie laisse place à une géométrie ellipsoïdale, la densité d'étoiles augmente jusqu'au centre galactique, où semble résider un trou noir de quelques 10 masses solaires (M ).
Cet univers-île constitué d'une centaine de milliards d'étoiles, rôde dans le groupe local de galaxies, entraînant ses satellites : le grand et le petit nuage de magellan, vers la conjointe qui lui est destiné : la grande galaxie d'Andromède M31. La rencontre se fera d'ici 3 milliard d'années, et donnera lieu à un feu d'artifice de formation d'étoiles. Et notre groupe local de galaxies se dirige lui même vers le super-amas de la Vierge.
Les grands succès de ce scénario de « Big Bang » sont premièrement de pouvoir reproduire l'abondance relative d'Hydrogène (3/4) et d'Hélium (1/4), principaux composants de la matière baryonique, par le calcul de la nucléosynthèse primordiale dans la soupe de nucléons soumise à une détente adiabatique. Et deuxièmement d'avoir prévu l'existence d'un rayonemment fossile, émis au moment où la température de l'univers devient inférieure à la température d'ionisation de l'Hydrogène, assez froid pour que les électrons et les protons se combinent durablement et forment les premiers atomes d'Hydrogène (environ 300 millions d'années après le Big Bang), libérant les photons de la diffusion Compton sur les électrons maintenant liés. L'univers devient transparent, et la gerbe de photons émis par ce corps noir à la température de 3300 K nous baigne depuis toujours. Cependant, sa température effective diminue à mesure que l'espace se dilate, et la longueur d'onde des photons avec. Ce rayonnement de fond (le Cosmological Microwave Background, ou CMB) a été découvert par hasard en 1967 par A. Penzias et R. Wilson, à une température de 3 K, correspondant à un décalage vers le rouge (le redshift z) de 1100.
Savoir si l'univers est infini (plat ou ouvert) ou fini (fermé) est une question qui reste ouverte. Pour le taux d'expansion observé, la densité critique de matière (ou d'énergie) contrebalançant exactement cette expansion par l'action attractive de la gravitation est de 6 nucléons (protons) par mètre cube. L'observation des anisotropies, des fluctuations de température du CMB, interprétées comme l'effet de fluctuations de densité dues aux ondes de pression (ondes sonores) primordiales, permet de contraindre la densité de l'univers à une valeur très proche de la densité critique.
Toutefois, le comptage de la matière dite baryonique, ordinaire ou lumineuse, dont la présence nous est révélée par le couplage des photons et de la matière, majoritairement sous forme de galaxies contenant des centaines de milliards d'étoiles, ne rend compte que de 5% de la densité critique.
Les courbes de rotation des galaxies ainsi que la dynamique des galaxies au sein des amas indique la présence d'une masse gravitationnelle invisible, nommée matière noire, ayant une densité de 25% de la densité critique. Le modèle froid de cette matière noire (Cold Dark Matter, ou CDM), utilisé dans les simulations cosmologiques de formation des structures, est le plus performant pour reproduire la distribution de matière observée dans l'univers local.
Les 70% encore manquants pour atteindre la densité critique sont actuellement attribués à la constante cosmologique , réintroduite plus de 50 ans après être tombée en disgrâce au profit du modèle du Big Bang, pour expliquer l'apparente accélération de l'expansion de l'univers (découverte par l'observation de supernovæ de type Ia à grand distance, par le Supernova Cosmology Project et le High-Z Team, en 1998).
Le modèle cosmologique ainsi décrit est connu sous l'acronyme de CDM, et prédit un univers agé de 13.7 0.2 milliards d'années
Ces 95% d'inconnu dans le bilan énergétique universel, loin de désespérer les astronomes, émoustille leur imagination et ne doit pas faire oublier la compréhension profonde de la physique de la matière baryonique acquise en moins d'un siècle d'observations et de théorie stellaire.
L'énigme de la source d'énergie permettant aux étoiles de briller durant des milliards d'années a été résolue durant la première moitié du XX siècle avec l'avènement de la physique nucléaire. Seule la fusion thermonucléaire d'éléments légers en éléments plus lourds fournit une énergie suffisante pour assurer durablement l'équilibre hydrostatique des étoiles.
Ainsi, formées majoritairement d'Hydrogène à leur naissance, les étoiles brûlent celui- ci en Hélium lorsque la température centrale atteint 10 K sous l'effet de la compression gravitationnelle (et ce durant 10 ans pour une étoile de 1 M ). Lorsque l'Hydrogène devient trop rare au centre de l'étoile, qui s'enrichit en Hélium, cette réaction s'éteint et la contraction gravitationnelle reprend. Lorsque la température centrale atteint 10 K, c'est au tour de l'Hélium de fusionner en Carbon et en Oxygène, via le Béryllium, pour assurer l'équilibre de l'étoile, dont l'enveloppe d'Hydrogène imbrûlé se dilate et se refroidit. L'étoile devient une géante rouge.
En fonction de la masse de l'étoile, le rythme de combustion varie : plus elle est massive, plus il faut d'énergie pour soutenir son propre poids, et plus les réserves d'Hydrogène s'épuisent vite (en 10 ans pour une étoile de 20 M ). D'autre part, la combustion d'élements de plus en plus lourds nécessite une température de plus en plus haute, et libère de moins en moins d'énergie.
Ainsi, le destin des étoiles est intimement lié à leur masse : Les étoiles de masse inférieure à 8 M terminent calmement de produire du Carbone et de l'Oxygène en leur cur, pendant que leur enveloppe externe s'échappe sous forme d'un vent stellaire (d'autant plus intense que l'étoile est massive et chaude, à l'origine d'une nébuleuse planétaire). Au final, le cur moribond de Carbone et d'Oxygène se contracte jusqu'à ce que la pression de Fermi des électrons dégénérés1.1s'oppose à la gravitation, et forme ainsi une naine blanche, objet compact un million de fois plus dense que la Terre (une cuillère à café de naine blanche a la masse d'un éléphant), d'un diamètre proche de celui de la Terre, ayant une température de surface de quelques 10 K, inerte et se refroidissant exponentiellement par rayonnement. La masse des naines blanches est de en moyenne de 0.6 M . Parallèlement à la contraction du cur, la pression de radiation qu'il émet éjécte les dernières couches superficielles, et les photons les plus énergétiques ionisent la nébuleuse circumstellaire qui devient visible : on parle de phase de nébuleuse planétaire, où la matière de l'étoile se sépare en deux phases, un plasma dilué coronal en expansion et un cur compact.
Une caractéristique remarquable des naines blanches est que plus elle sont massives, plus leur rayon est faible, donc plus leur densité est grande. Subrahmanyan Chandrasekhar en a conclu qu'au delà d'une masse de 1.44 M , le rayon de la naine blanche deviendrait nul, c'est à dire que la pression des électrons n'est plus capable de supporter cette masse. Ceci arrive aux étoiles de masse initiale supérieure à 8 M , pour lesquelles la combustion s'est rapidement poursuivie jusqu'au Fer, élément le plus stable dont la fusion ne produit pas d'énergie. L'étoile a une structure en pelure d'oignon : un cur de Fer qui grossit par fusion à la base de la couche de Silicium qui le couvre, elle même alimentée par la fusion de la couche de Magnésium, de Néon, d'Oxygène, suivie de couches de Carbone, puis d'Hélium et enfin d'Hydrogène. Le cur de Fer croît jusqu'à approcher la masse de Chandrasekhar, et lorsque sa densité dépasse les 10 g/cm , les protons des noyaux de Fer capturent les électrons, et se transforment en neutrons. La densité électronique diminuant, la pression qu'ils assuraient pour contenir l'effondrement gravitationnel décroît, la gravité l'emporte et l'effondrement s'accélère. Si la masse du cur de Fer est inférieure à 3 M , une étoile à neutrons se forme (dont la densité est proche de celle des noyaux atomiques : 10 g/cm , dont les pulsars sont la contrepartie observationnelle). Au delà de 3 M , l'objet formé est un trou noir, duquel ni particules ni photons ne peuvent s'échapper.
Ce collapse gravitationnel est extrêmement rapide (une fraction de seconde) et libère une énergie collosale de 2x10 erg, principalement sous forme de neutrinos. L'enveloppe de l'étoile réagit plus lentement, et tombe sur l'objet compact en formation jusqu'à croiser l'onde de choc retour (le rebond), où la pression et la température élevées permettent une ultime nuléosynthèse dite explosive, capable de former les éléments plus lourds que le Fer (du Cobalt à l'Uranium en passant par l'Argent et l'Or) que la nucléosynthèse hydrostatique ne produit que marginalement. Une faible fraction de l'énergie gravitationnelle libérée par le collapse est transformée en énergie cinétique (1%), et lumineuse (0.1%). Cette dernière constitue la contrepartie observable du collapse : une supernova, dite gravitationnelle.
En conclusion, les étoiles lèguent à la galaxie une fraction plus ou moins grande de leur matière, plus ou moins enrichie en métaux1.2sous forme d'une nébuleuse de gaz et de poussières qui enrichiront le milieu interstellaire, et un objet compact (naine blanche, étoile à neutrons ou trou noir), reliquat brûlant voué à refroidir lentement et à errer dans la galaxie. Les générations d'étoiles postérieures auront alors une métallicité plus grande. Ces noyaux lourds serviront de catalyseurs aux réactions nucléaires (cycle CNO), modifiant sensiblement l'équilibre hydrostatique et la luminosité de l'étoile par rapport aux générations précédentes.
La première utilisation cosmologique des supernovæ date probablement de 1604, lorsque l'apparition de la supernova dite de Kepler, dernière en date dans notre galaxie, quatre ans avant l'invention de la lunette astronomique, servit d'argument à Galilée contre le dogme aristotélicien toujours prévalent, selon lequel le monde supra-lunaire était immuable.
Le terme supernova fut introduit par Fritz Zwicky et Walter Baade en 1934 pour désigner les novæ surpuissantes. Ils firent l'hypothèse avant-gardiste qu'elles proviennent du passage d'une étoile normale à une étoile à neutron et qu'elles sont à l'origine des rayons cosmiques.